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KalachakralogoPrésentation des Upanishads

             Fleuron de la littérature sacrée de l'hindouisme, ces traités mystiques et philosophiques furent transmis dans le secret, de la bouche du Maître à l’oreille du disciple, pendant des siècles. Les Upanishads, en tant qu'ensemble, constituent la partie philosophique des Védas. Instructions religieuses avant tout, dont l'objet essentiel est la méditation et la philosophie (inséparablement liées dans la spiritualité orientale), elles traitent de la nature de l’homme et de l’univers, ainsi que de l’union de l’âme individuelle (jîva) ou Soi (Atman) avec l’Âme Universelle (Brahman).

             Ces textes sacrés védiques contiennent des enseignements ésotériques de la plus haute valeur, et ils sont la base authentique à partir de laquelle les grandes religions de l'Inde, hindouisme, jaïnisme et boudhisme, ont essaimé. Le lecteur familier du boudhisme y retrouvera tous les termes qui lui sont déjà familiers, de même que l'étudiant de l'ésotérisme y découvrira l'origine des concepts majeurs de cette discipline. Parmi la vaste mouvance des auteurs et mouvements ésotériques en Occident, seules la théosophie anglo-saxonne, réanimée par Helena P. Blavatsky au tournant du XIXème siècle, et la philosophie du Nouvel-Âge, initiée par Alice A. Bailey - qui reprit le flambeau de H.P. Blavatsky et livra la clef psychologique de la monumentale Doctrine Secrète -, ont repris la grande partie de ces notions clés, en les amplifiant et en les complétant de concepts nouveaux. A l'abord des Upanishads, on voit toujours, brillant d'un éclat d'autant plus impressionnant qu'il s'y est ajouté tant de développements majeurs ayant donné naissance à plusieurs systèmes de pensée complexes et complets, la source Une de toutes les diverses disciplines spirituelles qui s'épanouissent dans le monde contemporain.

             Peut-être aujourd'hui, alors que tant de voies diverses nous tentent, toutes également attrayantes, est-il plus que jamais nécessaire de revenir – ne serait-ce que momentanément – à la source première, et de la découvrir intacte, impolluée, ayant franchi les siècles sans perdre la moindre parcelle de sa luminosité originelle, et d'une fraîcheur qui étanche durablement notre soif de sens définitif.

 

Traduire, sans trahir
Le Glossaire
Des traductions, des influences...

 

Traduire, sans trahir

             Le sanskrit est une langue étonnamment concise, économe de toutes ces données (articles, adverbes et prépositions, temps de conjugaison) qui précisent sans confusion possible la valeur grammaticale des mots et l'articulation logique à l'intérieur de la phrase; de plus, le sanskrit amalgame 2, 3, voire 4 mots en un seul, sans se soucier de l'ordre logique avec lequel le lecteur doit les articuler mentalement pour donner un sens infailliblement précis à ce métamot, ce qui confirme bien que cette langue était réservée aux brahmanes, que sa textualité servait principalement de relais de mémorisation, le sens réel et profond étant l'objet d'une transmission orale de père en fils, de maître à disciple. Le secret du sens entier était ainsi préservé.

             Ce qui confirme bien les notions d'enseignement secret, ésotérique, réservé à l'élite des disciples (voir l'Introduction). Mais qui confirme encore plus que le sens réel, définitif, absolument vrai, est une notion typiquement occidentale, qui suscite probablement la perplexité de l'hindou !

             Car le sens intime, moral et métaphysique, est souple, ondoyant, il se perfectionne dans le secret de la méditation ou de la réflexion portée toujours plus avant, il n'est donc jamais définitif ou ne le devient qu'à partir du moment où l'esprit entre enfin dans la totalité du sens, c'est à dire dans le Brahman, c'est à dire dans l'ineffable.

             Cela dit, les textes sont là, d'une très grande beauté ! Livrant déjà, par leur seule textualité, un univers chatoyant de sens jusqu'alors inouïs, comme autant de pistes possibles vers une conscience holistique de notre être réel et de notre place véritable dans le monde, puis dans la Réalité tout-inclusive.

             Et l'attrait de les traduire, malgré les difficultés ou l'ampleur de l'entreprise, malgré les variantes (parfois divergentes !) des traductions déjà faites, se renforce au fur et à mesure qu'on les pénètre de plus en plus intimement.

             C'est paradoxal, mais c'est ainsi ! Et nombreux sont ceux qui ont cédé, du moins partiellement, à ce désir de transmettre à d'autres lecteurs ces textes au mystère éblouissant. Et chaque traducteur se dévoile dans la textualité de sa propre version du texte... tant cette connaissance du sens est intime, infiniment variable d'un être à l'autre, tout en restant indéniablement une expression véritable de l'essence de l'Upanishad.

             La nécessité – pendant des siècles – d'accompagner les Upanishads les plus importantes de commentaires de grands maîtres, est évidente. Vue l'unité profonde de tout l'enseignement upanishadique, ces commentaires valent pour toutes ! Les mêmes concepts courent de part en part des 108 Upanishads, mais ils sont suffisamment nombreux pour décourager les esprits plus pratiques, pressés d'obtenir des résultats, d'où la réputation de textes « ardus », voire « cryptiques », ou tout simplement « réservés aux initiés » communément mais faussement attribuée à ces concepts.

             Il est temps de dépoussiérer le rayon 'Upanishads' de notre savoir collectif, et de les montrer enfin dans leur authenticité !

             Et de les rendre accessibles – je veux dire réellement accessibles – au public français qui ne possède pas une maîtrise suffisante de la langue anglaise.

             J'ai choisi de traduire au plus près le texte ''officiel'' de la traduction anglo-indienne, celle qui fait foi actuellement. Le sanskrit est une langue érudite, comme nos latin et grec, et l'anglais est celle que partage à la fois la communauté entière de l'Inde, celle des Indiens hors de l'Inde (très nombreuse), et la communauté des non-Indiens qui sont frères spirituels de l'Inde. J'ai d'autant plus foi en ces traductions, qu'elles émanent d'une source de transmission ininterrompue jusqu'à nos jours.

             Le français étant plus prolixe que l'anglais, et encore bien plus que le sanskrit, j'ai opté pour autant de mots que nécessaire pour aboutir à un sens sans ambiguïtés, dans une fluidité de lecture indispensable à la persévérance du lecteur, avec néanmoins le souci de respecter au plus près le mot à mot des termes anglais, donc l'importance et la priorité donnée dans la chaîne des concepts mis en interaction dans une phrase, c'est à dire dans un enseignement.

             J'ai inséré des notes, le moins possible, mais suffisamment pour que le sens complet du message soit transmis au lecteur.

             Je tiens à préciser que de nombreux casse-têtes surgissent, que la majorité des traducteurs ont escamotés, soit en sautant le tronçon de phrase, soit en faisant un raccourci entre les phrases d'un verset. Ainsi, une partie du texte original, plus ou moins variable selon son degré de difficulté, n'est jamais apparue en traduction ! Je comprends ces raisons, et aussi que les éditeurs exigent sans doute du bref, de l'attrayant.
Mais il est temps de retourner aux sources véritables... Pour ma part, je sais que « qui cherche, trouve », à quelque niveau que ce soit, et quand réellement je n'ai pas trouvé, plutôt que d'escamoter, j'insère une note le signalant ou je pose un (? )
après le terme demeuré obscur.

             Enfin, last but not least, je remercie sincèrement et chaleureusement tous les traducteurs (en anglais comme en français) qui m'ont permis de connaître et d'aimer les Upanishads – ce qui prouve bien la valeur de leur travail – et qui ont su me communiquer le désir d'en savoir plus, d'aller plus loin en connaissance et en expérience. Puissè-je faire un travail aussi bon que le leur !


Le Glossaire

 

             Je l'ai commencé il y a plus de 20 ans, pour m'épargner des manipulations de livres nombreux et des recherches infructueuses de termes "déjà-vus-mais-où-exactement?"... Fidèle et brave répertoire, multicolore, anarchique, facile à glisser dans un sac, si indispensable... En voici la version électronique, remaniée et complétée, qui s'enrichira forcément en cours de route – quand donc un glossaire est-il achevé, complet ?

             Pour alléger les notes au fil des versets d'Upanishads, je l'intègre comme un outil indispensable à ce site. Visitez-le à votre gré...

             Le choix délibéré d'une transcription sans signes diacritiques (accents, etc) est exposé au début du glossaire.

 

Des traductions, des influences...

 

             Je rends ici hommage à Max Müller, qui – en 1878, à Oxford – publia les fameux « Sacred Books of the East » en XXIV volumes, auxquels de nombreux chercheurs sur les voies intérieures, dont notamment Carl-Gustav Jung, se sont référé très abondamment, et qui sont aujourd'hui encore une référence indiscutée, tant pour leur érudition que pour la clarté subtile avec laquelle Müller a traité des religions comparées, ouvrant la voie à ce que Mircéa Eliade allait développer quelques décennies plus tard en inaugurant la discipline universitaire d'Histoire comparée des Religions. Désuet, bien sûr, mais pourtant incontournable, ce long passage que je traduis ci-après montrera à quel point les concepts hindous ont imprégné – souvent à notre insu – notre culture contemporaine, et quel est le chemin parcouru de l'érudit du XIXe au citoyen du monde du 3ème millénaire.

 

PREMIÈRES TRADUCTIONS DES UPANISHADS :

" DÂRÂ SHUKOH, ANQUETIL DUPERRON, SCHOPENHAUER"

             « La littérature Védique ancienne, fondement de toute la littérature de l'Inde, qui a été transmise dans ce pays en une succession continue depuis les temps les plus anciens de mémoire d'homme jusqu'à aujourd'hui [en 1878, donc], s'est fait connaître pour la première fois par-delà les frontières de l'Inde à travers les Upanishads. Les Upanishads furent traduites du Sanskrit en Persan par, ou alors pour Dârâ Shukoh, le fils aîné du Shâh Jehân, un prince éclairé, qui professait ouvertement les principes religieux libéraux du grand Empereur Akbar, et écrivit même un livre dans l'intention de réconcilier les doctrines religieuses des Hindous et des Musulmans. Il semble qu'il ait tout d'abord entendu parler des Upanishads durant un séjour au Cachemire en 1640. Il invita par la suite plusieurs Pandits [théologiens éminents, hommes de lettres et de loi érudits] originaires de Bénarès à venir à Delhi, pour l'assister dans ce projet de traduction. Cette traduction fut terminée en 1657. Trois années plus tard, en 1659, le prince fut mis à mort par son frère Aurangzib, en réalité, et sans aucun doute, parce qu'il était le fils aîné et l'héritier légitime du Shâh Jehân, mais sous prétexte qu'il était un infidèle, et un danger pour la religion officielle de l'empire.

             « Une fois que les Upanishads furent traduites du Sanskrit en Persan, qui était à cette époque la langue orientale la plus largement diffusée dans tout l'Est, mais aussi la mieux connue de nombreux érudits européens, elles devinrent généralement accessibles à tous ceux qui avaient de l'intérêt pour la littérature religieuse de l'Inde. Il est vrai que sous le règne d'Akbar (1556-1586), des traductions similaires avaient été préparées, mais ni celles-là ni la traduction de Dârâ Shukoh n'attirèrent l'attention des lettrés Européens avant l'année 1775. Cette année-là, Anquetil Duperron, le célèbre voyageur, qui avait découvert le Zend-avesta [recueil de textes religieux de la Perse antique, dont l'auteur présumé est Zoroastre, fondateur du mazdéisme], reçut un manuscrit de la traduction persane des Upanishads, que lui envoya M. Gentil, résident français à la cour de Shuja-ud-daula, et qu'amena en France M. Bernier. Lorsqu'il eut reçu un second manuscrit, Anquetil Duperron compara les deux, et traduisit la version Persane en français (non publiée), puis en latin. Cette traduction en Latin fut publiée en 1801 et en 1802, sous le titre d'Oupnek'hat, id est, Secretum tegendum: opus ipsa in India rarissimum, continens antiquam et arcanam, seu theologicam et philosophicam doctrinam, e quatuor sacris Indorum libris Rak baid, Djedjer baid, Sam baid, Athrban baid excerptam; ad verbum, e Persico idiomate, Samkreticis vocabulis intermixto, in Latinum conversum: Dissertationibus et Annotationibus difficiliora explanantibus, illustratum: studio et opera Anquetil Duperron, Indicopleustæ. Argentorati, typis et impensis fratrum Levrault, vol. i, 1801; vol. ii, 1802. [Voili-voilà... ouf ! On avait le temps, à l'époque, de lire un titre en entier... Les lecteurs patients et futés auront reconnu en Rak baid le Rig Véda, en Djedjer baid le Yajur Véda, et en Sam baid et Athrban baid les Sama et Atharva Védas !]

             « Cette traduction, quoiqu'elle ait suscité un intérêt considérable de la part des lettrés, était écrite dans un style si totalement inintelligible, qu'elle exigea l'œil de lynx et la perspicacité d'un intrépide philosophe, tel que Schopenhauer, pour découvrir un fil logique à travers un tel labyrinthe. Schopenhauer, cependant, non seulement trouva et suivit ce fil, mais il eut le courage de proclamer face à une époque incrédule que de vastes trésors de la pensée gisaient ensevelis sous cet effroyable jargon.

             « Comme les volumes d'Anquetil Duperron sont devenus rares, je vais donner ici un bref aperçu de sa traduction, qui correspond à la première phrase de ma traduction de la Khândogya-upanishad (p. 1):--'Oum hoc verbum (esse) adkit ut sciveris, sic τ maschghouli fac (de co meditare), quod ipsum hoc verbum aodkit est; propter illud quod hoc (verbum) oum, in Sam Beid, cum voce altâ, cum harmoniâ pronunciatum fiat. 'Adkiteh porro cremor (optimum, selectissimum) est: quemadmodum ex (præ) omni quieto (non moto), et moto, pulvis (terra) cremor (optimum) est; et e (præ) terra aqua cremor est; et ex aqua, comedendum (victus) cremor est; (et) e comedendo, comedens cremor est; et e comedente, loquela (id quod dicitur) cremor est; et e loquela, aïet το Beid, et ex aïet, τ siam, id est, cum harmonia (pronunciatum); et e Sam, τ adkit, cremor est; id est, oum, voce alta, cum harmonia pronunciare, aokit, cremor cremorum (optimum optimorum) est. Major, ex (præ) adkit, cremor alter non est.'

             « Schopenhauer non seulement lut cette traduction très attentivement, mais – et il n'en fit pas secret – sa propre philosophie s'est puissamment imprégnée des doctrines fondamentales des Upanishads. Il s'étend sur ce sujet encore et encore, et il me semble à la fois équitable à la mémoire de Schopenhauer et d'une haute importance pour une juste appréciation de la valeur philosophique des Upanishads, de rassembler ce que ce penseur vigoureux a écrit sur ces antiques rhapsodies de vérité.

             « Dans Le Monde comme Volonté et Représentation, il écrit, dans la préface à la première édition, p. xiii:

             ''Si le lecteur a également bénéficié des Védas, auquel l'accès par la voie des Upanishads est à mes yeux le plus grand privilège dont ce siècle encore jeune (1818) puisse se targuer face à tous les siècles précédents, (car je pressens que l'influence de la littérature Sanskrite ne sera pas moins profonde que la renaissance de la pensée grecque au XIVe siècle,)--si donc le lecteur, dis-je, a reçu son initiation à la sagesse originelle de l'Inde, et l'a reçue dans un esprit ouvert, il aura été préparé de la meilleure façon à entendre ce que j'ai à lui dire. Ça ne lui semblera pas étrange, comme à tant d'autres, et encore moins désagréable; car je soutiendrais volontiers, si ça ne paraissait pas vaniteux, que n'importe laquelle des propositions prises séparément qui constituent les Upanishads, pourrait être déduite comme résultat nécessaire des axiomes fondamentaux que je dois énoncer, bien que ces déductions elles-mêmes ne soient en aucune manière à trouver ici.''

             « Et encore :

             ''Si je considère combien il est difficile, même avec l'assistance des professeurs les mieux éduqués et les plus érudits, de concert avec tous les excellents outils philologiques rassemblés au cours de ce siècle, d'arriver à une compréhension réellement correcte, précise, et vivante des Grecs et des Romains, dont la langue était après tout celle de nos prédécesseurs directs en Europe, et la source-mère de notre propre langue, à l'inverse du Sanskrit, qui fut parlé des milliers d'années auparavant dans l'Inde lointaine, et ne peut être étudiée qu'au moyen d'outils encore très imparfaits;--si j'ajoute à cela l'impression que les traductions des termes sanskrits par les érudits d'Europe, sauf très rares exceptions, produisent sur mon esprit, je ne peux m'empêcher de soupçonner que nos doctes Sanskritistes ne comprennent pas mieux leurs textes que les élèves des classes supérieures face à leurs textes grecs. Bien sûr, n'étant pas des jeunes garçons, mais des hommes de savoir et de compétence, ils collent bout à bout, à partir de ce qu'ils peuvent comprendre, et s'approchent plus ou moins de ce qu'a pu être la signification générale, mais il est plus que probable que s'y glissent des colmatages ingénieux. Et c'est encore pire avec le Chinois pour nos Sinologues européens.

             ''Si je considère, par ailleurs, que le Sultan Mohammed Dârâ Shukoh, frère d'Aurangzib, qui naquit et fut éduqué en Inde, était un lettré, à l'esprit réfléchi et investigateur, et que par conséquent il comprenait probablement son Sanskrit aussi bien que nous notre Latin, qu'en sus de cela il fut assisté par quantité de Pandits des plus compétents, tout cela me donne d'emblée une très haute opinion de sa traduction des Upanishads védiques en Persan. Si, en plus, je considère la révérence profonde et des plus légitime avec laquelle Anquetil Duperron a traitée cette traduction en persan, la traduisant en Latin mot par mot, conservant, en dépit de la grammaire latine, la syntaxe du Persan et tous les mots du Sanskrit que le Sultan lui-même avait conservés sans les traduire, préférant les expliquer dans un glossaire, Je ressens une confiance totale quand je lis cette traduction, et cette confiance ne tarde pas à recevoir sa plus parfaite justification. Car, à quel point les Oupnekhat respirent entièrement et de part en part l'esprit sacré des Védas! A quel point toute personne qui, par une étude diligente de leur version Persan-Latin, s'est familiarisée avec cette œuvre incomparable, est remuée par cet esprit jusqu'au tréfonds de son âme! Comme chaque ligne déploie sa signification, ferme, définitive, et intégralement harmonieuse! De chacune de leurs sentences surgissent des pensées profondes, originales et sublimes, et le tout est pénétré d'un esprit élevé, et sacré, et sincère. Nous baignons dans l'esprit de l'Inde, tout comme dans les pensées originales d'esprits de la même famille. Et oh, comme notre esprit se trouve ici purifié intégralement de toutes les superstitions judéo-chrétiennes qui s'y sont greffées de bonne heure, autant que de toute la philosophie qui néanmoins s'est hérissée face à ces superstitions! Dans le monde entier, il n'est pas d'étude, à l'exception de celle des originaux, qui soit aussi profitable ni aussi élevée que celle des Oupnekhat. Elles auront été la consolation de ma vie, elles seront le soulagement de ma mort!

             ''Bien que je ressente le plus haut respect pour les œuvres religieuses et philosophiques de la littérature sanskrite, je n'ai pas pu tirer un vif plaisir de leurs compositions poétiques. Que dis-je, elles m'apparaissent parfois dénuées de goût et monstrueuses comme la sculpture de l'Inde. [Sic! Chacun ses goûts... et ses limites. NdT]

             ''Chez la plupart des philosophes païens des premiers siècles de l'ère chrétienne, nous voyons le théisme judaïque, lequel, comme le Christianisme, devait peu après devenir la croyance du plus grand nombre, percer à travers eux, tout comme à présent nous pouvons percevoir, perçant à travers les écrits de nos lettrés, le panthéisme natif de l'Inde, lequel est destiné tôt ou tard à devenir la croyance du plus grand nombre. Ex oriente lux. (De l'orient, vient la lumière).''

             «Tout cela peut sembler un langage fort, et, par certains aspects, trop rude. Mais j'ai trouvé que ces citations se justifiaient, parce que, quels que puissent être les arguments hostiles à l'encontre de Schopenhauer, il n'en demeure pas moins un penseur d'une profonde honnêteté qui s'est exprimé avec sincérité, et on ne peut le soupçonner de la moindre prédilection pour ce qu'on a si facilement qualifié de mysticisme de l'Inde. Que Schelling et son école ait usé du langage de l'enthousiasme frénétique à propos des Upanishads, pourrait ne faire qu'un léger contrepoids à la vaste classe des philosophes par lesquels tout ce qui se situe par-delà les nuages de leur propre horizon, est étiqueté 'mysticisme'. Mais que Schopenhauer ait parlé des Upanishads comme de 'produits de la suprême sagesse' (Ausgeburt der höchsten Weisheit [Parerga, p. 428]), qu'il ait placé le panthéisme par elles enseigné bien au-dessus du panthéisme de Bruno, Malebranche, Spinoza, et Scot Erigène, ainsi que de nouveau mis en lumière à Oxford en 1681, pourrait peut-être assurer une réception plus respectueuse à ces reliques d'une antique sagesse que ne le pourrait tout ce que je puis dire en leur faveur.

 

RAMMOHUN ROY

             «Plus grande, cependant, que l'influence exercée sur la pensée philosophique de l'Europe moderne, a été l'impulsion que ces mêmes Upanishads ont communiquée à la vie religieuse de l'Inde moderne. Vers la même année (1774 ou 1775), lorsque le premier manuscrit de la traduction persane des Upanishads fut reçu par Anquetil Duperron, Rammohun Roy naquit en Inde, qui allait initier la réforme et le réveil de l'antique religion des Brahmanes. Un homme qui dans sa jeunesse a pu écrire un livre tel que 'Contre l'Idolâtrie de toutes les Religions,' et qui par la suite exprima en termes si fréquents et si précis sa 'croyance en l'autorité divine du Christ', était peu susceptible de retenir quoi que ce soit de la littérature sacrée de sa propre religion, à moins qu'il n'ait perçu en elle la même autorité divine qu'il avait reconnue aux enseignements du Christ. Il rejeta les Purânas, il ne se serait pas laissé ébranler dans ses convictions par l'autorité des Lois de Manu, ni même par la sacralisation des Védas. Il était au-dessus de tout ça. Mais il découvrit dans les Upanishads et dans ce qu'on appelle communément le Vedânta, quelque chose de bien différent de tout le reste, quelque chose qui ne devait pas être rejeté, quelque chose qui, à condition d'être correctement compris, pourrait constituer le terrain natif adéquat, dans lequel – et lui seul - les semences de la religion véritable, oui, de l'authentique Christianisme, pourraient germer de nouveau et prospérer dans toute l'Inde, comme elles l'avaient fait autrefois des philosophies d'Origène ou de Synésius. Les érudits européens se sont souvent étonné de ce que Rammohun Roy, dans sa défense des Védas, ait pu rejeter les Samhitâs et les Brâhmanas, et n'ait désigné que les seules Upanishads comme noyau authentique du Véda en son entier. Historiquement, sans aucun doute, il se trompait, car les Upanishads présupposent à la fois les hymnes et les livres liturgiques du Véda. Mais, de même que les anciens philosophes ont établi une distinction dans les Védas entre le Karma-kânda et le Gñâna-kânda [littéralement, le bulbe du Karma et du Jnana, en tant que parties constituantes de l'arbre des Védas], entre les œuvres et le savoir; de même qu'ils ont eux-mêmes désigné l'apprentissage des hymnes sacrés et l'accomplissement des sacrifices comme la seule préparation adéquate à cette illumination qui était réservée comme plus haute récompense à l'accomplissement fidèle de tous les devoirs qui précèdent, Rammohun Roy, comme Bouddha et d'autres hommes ayant reçu l'illumination avant lui, perçut que le temps où l'on devait insister sur toute cette discipline des temps passés, avec ses prescriptions minutieuses et ses observances superstitieuses, était révolu, tandis que le savoir transmis par les Upanishads ou le Vedânta, enveloppé comme il peut l'être sous d'étranges couches, devait dès lors former les fondations d'une nouvelle vie religieuse. Il ne tolérait aucune idolâtrie, pas même de la part de sa mère, pauvre femme, qui après avoir rejoint ses adversaires les plus âpres, confessa à son fils, avant d'entreprendre son dernier pèlerinage à Jaggernaut, où elle décéda, 'qu'il avait raison, mais qu'elle était une faible femme, trop âgée pour renoncer aux observances qui lui étaient un tel réconfort.' Ce ne fut pas le moins du monde, par conséquent, en considération de leur antiquité ni de leur caractère sacré, que Rammohun Roy resta si attaché aux Upanishads, au point qu'il les traduisit en Bengali, en Hindi, et en Anglais, et les fit publier à ses frais. Mais parce qu'il reconnut en elles les semences de l'éternelle vérité, et eut la hardiesse intellectuelle d'y distinguer entre ce qui est essentiel et ce qui ne l'est pas,--distinction, comme il le remarqua plus d'une fois avec une grande perplexité, que les maîtres de la doctrine chrétienne apparemment sont incapables ou refusent de faire.

             « La mort de cet homme réellement grand et bon, durant un séjour en Angleterre en 1833, fut l'un des coups les plus sévères qui s'abattirent sur les perspectives favorables de l'Inde. Mais son œuvre n'aura pas été vaine. Telle un arbre dont la première pousse a été détruite par un gel hivernal, elle a rejailli en nombreuses nouvelles pousses plus vigoureuses, car quelles que puissent être les différences apparentes entre l'Âdi Brahmo Samâj de Debendranath Tagore, ou le Brahmo Samâj de l'Inde de Keshub Chunder Sen, ou le Sadharan Brahmo Samâj, la racine qui leur est commune est l'œuvre accomplie, une fois pour toutes, par Rammohun Roy. Son influence peut avoir été éclipsée pendant une certaine période, et ses manifestations actuelles [écrit en 1878] peuvent paraître aux yeux de nombreux observateurs qui sont trop proches, sans grandes promesses. Mais sous une forme ou une autre, sous un nom ou un autre, j'en reste convaincu, cette œuvre survivra. 'En Inde,' écrit Schopenhauer, 'notre religion, ni maintenant ni jamais, ne prendra racine: la sagesse des origines de l'humanité ne sera jamais évacuée là-bas par les découvertes de Galilée. Bien au contraire, la sagesse de l'Inde se déversera de nouveau sur l'Europe, et y produira un changement profond dans notre savoir et notre mentalité.' Ici encore, le grand philosophe me semble s'être laissé emporter trop loin par son enthousiasme pour ce qu'on connaît le moins. Il est aveugle aux aspects sombres des Upanishads, et il ferme volontairement ses yeux devant les rayons de vérité éternelle qui brillent dans les Évangiles, que même Rammohun Roy fut assez rapide à percevoir derrière les brumes et les nuées de la tradition qui se rassemblent si vite au lever de soleil de toute religion. »

The Sacred Books of the East,
Translated by various Oriental scholars and Edited by F. Max Müller
Vol. I - The Upanishads
Oxford, The Clarendon Press (1879)

 
 

                                                                                                                                                                                                
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